Scene Deconstruction avec Nicola Daley, BSC ACS

Janvier 15, 2024

Introduction

Réalisé par Terence Davies, Les Carnets de Siegfried (titre original : Benediction) est un film encensé par la critique qui raconte l’histoire de Siegfried Sassoon. Ce poète et écrivain anglais célèbre a été décoré de la Croix Militaire pendant la Première Guerre mondiale, alors qu’il servait sur le front occidental. Ses poèmes témoignaient des horreurs de la guerre de tranchées, et Les Carnets de Siegfried retrace une grande partie de sa vie, de 1915 aux années 1950. Deux acteurs interprètent le poète, Jack Lowden et Peter Capaldi, chacun jouant une période différente de sa vie. Nicola Daley BSC, ACS a remporté le prix de la Meilleure cinématographie pour Les Carnets de Siegfried et, pour cette Scene Deconstruction, elle révèle certaines de ses techniques qui ont permis de donner vie à cette histoire incroyable.

Nicola a choisi la VENICE après l’avoir déjà utilisée lors d’un projet précédent, pendant lequel elle avait été conquise par sa science des couleurs, son espace colorimétrique et le rendu des skin-tones. Après avoir lu le scénario pour Les Carnets de Siegfried et constaté que l’histoire serait notamment transmise à travers les expressions des acteurs, les émotions et des plans portraits, elle était convaincue que la VENICE serait la caméra idéale pour le film.

Scene Deconstruction : en coulisse

  • Un système de contrôle des mouvements assisté par ordinateur a permis de répéter plusieurs fois le même mouvement de caméra avec une très grande précision, afin de favoriser une intégration transparente entre les différentes prises de vue.
  • Avec des variations de température de couleur de l’éclairage, il est possible de renforcer la sensation de voyage dans le temps ou d’exagérer un changement d’émotion, le chaud représentant la joie et le froid la tristesse.
  • En maintenant un plan sur une longue période, on peut accentuer l’intensité dramatique d’une scène.

Scène de l’église

Il s’agit d’un moment important du film, car c’est la première fois où nous découvrons Siegfried Sassoon âgé, interprété par Peter Capaldi. Le réalisateur Terence Davies souhaitait pour cette scène une transition naturelle, fluide et très subtile entre Lowden et Capaldi, avec la caméra décrivant un arc de cercle à 180 degrés autour des acteurs. Nicola a compris qu’il lui faudrait utiliser un appareil de contrôle des mouvements pour obtenir des plans cohérents des deux acteurs. Pour faciliter la transition, les costumes des acteurs sont restés très similaires. Comme il fallait un certain temps pour réaliser les deux scènes, un éclairage homogène était également nécessaire.

Images côte à côte prises par une caméra à 180 degrés placée à l'intérieur de l'abbaye

Nicola s’est rendu compte que ce serait un défi d’éclairer un espace aussi grand qu’une abbaye afin de garantir un bon mouvement de caméra à 180 degrés. Heureusement, elle a pu utiliser les nombreuses colonnes du bâtiment pour cacher plusieurs lumières SkyPanel. Chaque SkyPanel était diffusée à l’aide de 216 gels, et des drapeaux furent également utilisés pour contrôler les points chauds. Pour que la lumière du jour qui traversait les fenêtres au fond de l’abbaye soit homogène, un appareil 18K monté sur une nacelle était placé à l’extérieur. Nicola précise que la préparation de ce plan a nécessité un certain temps, mais elle considère que cela en valait la peine, car il est maintenu pendant un long moment dans le film.

Scène à Craiglockhart

Cette partie du film relate la période passée par Siegfried à Craiglockhart, un hôpital psychiatrique spécialisé dans le traitement des officiers frappés par des obus. C’est ici qu’il y fait la connaissance du poète Wilfred Owen, qui jouera rapidement un rôle important dans sa vie. Pour cette scène, Terence voulait vraiment capturer le langage corporel des acteurs.

Scène avec Wilfred Owen et Siegfried Sassoon, dans Les Carnets de Siegfried

À la fin de la scène, il y a une seule longue prise : la caméra suit les acteurs hors de l’hôpital, le long de quelques marches, puis reste fixée sur eux alors qu’ils se disent adieu. Il y a ensuite un contrechamp rapide sur Wilfred Owen qui monte dans un taxi et part. C’est la dernière fois où ils se voient, car Owen sera tué en repartant à la guerre. Nicola considère que la longueur de ce plan était importante pour souligner l’intensité du moment.

Il y a également de nombreuses scènes dans le cabinet d’un docteur de l’hôpital. Pour donner l’impression du temps qui passe, Nicola a joué avec des variations d’éclairage dans la pièce. Du côté du docteur, l’espace est un peu plus sombre. Elle a utilisé des lumières pratiques équipées d’ampoules au tungstène pour apporter une touche d’authenticité. Et du côté de Siegfried, elle a placé une lampe 18K à l’extérieur de la fenêtre, de manière à ce que le cadre projette une ombre semblable à un gobo sur le mur du fond.

Images côte à côte montrant Siegfried Sassoon et le docteur dans Les Carnets de Siegfried
Siegfried Sassoon dans le cabinet du docteur

Nous avons tourné une grande partie du film avec des objectifs de 35 et 40 mm. Terence aime beaucoup les plans moyens et il aime que la caméra soit directement en face, puis dans le sens inverse. C'est en quelque sorte son esthétique personnelle et sa façon de voir le monde.

Nicola Daley
BSC ACS

Scène du baptême

Siegfried Sassoon et sa femme avaient organisé une réception pour le baptême de leur bébé et, alors qu’ils dansent, Siegfried
entre dans une séquence de souvenirs, où l’on voit tous les amours de sa vie. Siegfried était homosexuel, donc beaucoup de ces amours étaient des hommes. Cependant, il a choisi de se conformer aux normes de l’époque, et a ainsi épousé une femme. Terence voulait explorer la manière dont les gens se rappellent les souvenirs, et comment la vie quotidienne influence ceux-ci. Pour créer cette illusion d’un voyage à travers les souvenirs de Siegfried, et pour respecter la nature poétique des personnages et du film, Terence et le monteur ont utilisé beaucoup de fondus à la suite. La séquence commence par un plan Steadicam du couple en train de danser, puis la caméra se déplace autour des acteurs, et les dépasse alors qu’un grand miroir commence à remplir l’arrière-plan.

« C’était une séquence très intéressante », explique Nicola, « parce qu’elle mêle l’esthétique et la nature poétique de Terence avec des effets visuels. »

Siegfried Sassoon dansant avec sa femme dans une scène de Les Carnets de Siegfried

En post-production, le reflet de la Steadicam a été retiré du miroir et remplacé par des images de Siegfried dansant avec ses autres partenaires. Nicola a tourné les plans de cette danse vue à travers le miroir dans un studio improvisé équipé d’un écran vert, avec une seule piste et une dolly. Cela lui a permis de répéter le même mouvement de caméra pendant que Siegfried dansait avec chaque personne.

Scène du miroir dans Les Carnets de Siegfried avec Siegfried Sassoon dansant avec un homme

Dans un autre plan, on voit Siegfried regarder à travers le côté d’une fenêtre, tandis que des portraits de personnes dont il se souvient sont superposés sur l’autre moitié. Pour cette scène, les portraits ont été filmés sur les mêmes sites et avec le même éclairage que lors de leur première rencontre avec le poète.

Scène de reflet à la fenêtre dans Les Carnets de Siegfried, montrant Siegfried Sassoon à différents âges

Pour la scène du miroir, Nicola a soigneusement ajusté l’éclairage pour chaque partenaire en changeant les gels de température de couleur de manière à ce que l’éclairage devienne plus froid au fur et à mesure que le personnage vieillit, pour finir sur un plan très froid avec la version plus âgée de Siegfried, incarnée par Peter Capaldi. La froideur de ce dernier plan contribue à renforcer la tristesse que ressent Siegfried Sassoon, parce qu’il n’est pas heureux dans sa vie.

Scène du miroir dans Les Carnets de Siegfried, montrant Siegfried Sassoon dansant avec des partenaires masculins et féminins, sous ses traits de jeune homme et d'homme plus âgé.

Scène du banc

Les Carnets de Siegfried se conclut par une scène où l’on voit d’abord Siegfried Sassoon âgé, assis sur un banc au crépuscule, qui se transforme doucement en Siegfried plus jeune, tandis que l’on entend le poème Over The Top de Wilfred Owen et que la caméra se rapproche lentement. Nicola n’a rien utilisé d’autre que des polyboards pour refléter une partie de la lumière ambiante, tout en profitant de la sensibilité de base supérieure de 2 500 ISO de la VENICE.

Siegfried Sassoon assis sur un banc pour la scène finale dans Les Carnets de Siegfried.

« Nous n’avions droit qu’à une seule prise », confie Nicola. « Et vous pouvez voir la lumière s’estomper au cours du plan, ce que je trouve absolument magnifique, et je pense n’avoir jamais vu cela dans un film, avec un plan tenu aussi longtemps et où l’on peut voir la lumière disparaître… … le résultat est fantastique, c’est une véritable démonstration de l’efficacité de la VENICE. »

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